Belgique : les alarmantes conséquences de la surmédication des séniors

 

En Belgique, un tiers des hospitalisations de personnes âgées sont dues à la prescription de médicaments inappropriés. C’est l’inquiétante conclusion d’une étude menée par les chercheurs du département de pharmacologie de l’Université Catholique de Louvain (UCL) publiée le 1er octobre. L’étude démontre en outre que l’abus d’anti-inflammatoires et de benzodiazépines chez les séniors est en grande partie responsable de ces hospitalisations. Devant ce constat accablant, les chercheurs de l’UCL plaident pour un changement des mentalités. Politique de prévention, plus grande coopération avec le patient, de nombreuses pistes sont avancées pour diminuer sur le long terme les hospitalisations dues aux médicaments.

 

Population hyperconsommatrice de médicaments, les séniors belges sont particulièrement exposés aux conséquences de prescriptions inappropriées à leurs besoins réels. Selon l’UCL, les populations âgées de plus de 80 ans en consommeraient au moins dix par jour, dont un serait totalement inapproprié pour plus de la moitié d’entre eux. L’étude de l’UCL démontre que la prise en trop grande quantité d’anxiolytiques, de somnifères ou d’anti-inflammatoires occasionne fréquemment des troubles du sommeil, des chutes avec fractures, ou des problèmes cognitifs. En outre, les prescriptions négligent plusieurs facteurs tels que des dosages  inadaptés ou les mauvaises interactions avec d’autres médicaments.

 

Le constat posé, les chercheurs de l’UCL avancent plusieurs pistes pour diminuer le nombre d’hospitalisation dues aux médicaments. En premier lieu, établir une meilleure coopération entre le prescripteur et son patient afin de mieux mesurer l’efficacité des traitements et prévenir tout effet indésirable. Dans le cadre du projet européen OPERAM, les chercheurs ont ainsi pu réévaluer les besoins de 500 patients de la clinique Saint-Luc de Louvain. A l’issue de ces réévaluations, il est apparu que 48% des patients ont dû cesser la prise d’un médicament considéré comme inutile ou dangereux. Pis, dans 63% des cas, il a fallu entamer une autre médication, négligée par des diagnostics antérieurs.

 

Autre piste avancée par les chercheurs belges, une meilleure coordination entre les différentes équipes de soin, une association plus étroite entre médecins hospitaliers et généralistes. Associés à des pharmaciens cliniciens, les médecins hospitaliers utiliseront un logiciel permettant d’identifier les médicaments inappropriés ou dangereux. Ainsi, ils établiront de nouveaux diagnostics tout en associant le patient et son médecin généraliste dans ce processus de réévaluation.

 

Véritable enjeu de santé publique, la médication des séniors doit faire l’objet d’une meilleure considération dans l’opinion et au niveau des décideurs politiques. En France, cette prise de conscience s’est opérée à travers la création en juillet 2016 du  Collectif du bon usage du médicament. Rassemblant tous « les acteurs du médicament » (médecins, pharmaciens, infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, industriels, acteurs de la protection sociale et du service à la personne), le collectif compte parmi ses membres deux institutions paritaires adhérentes de l’Ipse – les groupes Klésia et Malakoff-Médéric. L’Ipse s’engage à mieux faire connaître dans de prochaines publications les contours de ce programme particulièrement ambitieux.