De Bruxelles, à Göteborg, en passant par Luxembourg… Reveil de l’Europe sociale ?

 

Le 25 janvier dernier s’est tenu, à Bruxelles, la clôture d’une vaste consultation portant sur ce que pourrait être un socle de droits sociaux européens.

Jean-Claude Juncker – Président de la Commission européenne – a confirmé que ce socle devrait, dans un premier temps, s’appliquer aux 19 États membres de la zone euro, laissant la possibilité aux autres États membres qui le souhaiteraient  de s’y joindre.

 

Conseils européens du 18 octobre et du 17 novembre…

 18 octobre, le Conseil des ministres européens en charge de l’emploi et de la politique sociale a trouvé un accord unanime à propos de la proclamation du texte devant faire vivre les droits sociaux fondamentaux qui sera signé à Göteborg (Suède) le 17 novembre prochain. La veille, le 16,  la CES tiendra conférence pour réaffirmer ses revendications et obtenir le socle des droits sociaux. Elle déclare que « les ministres du travail ont fait ce qu’il fallait et mis de côté leurs différences pour approuver le socle européen des droits sociaux fondamentaux. Partout en Europe, les travailleurs attendent des actions rapides et de nouvelles lois concernant le congé parental, le congé des proches aidants, l’amélioration des conditions de travail et de sécurité, l’accès à la protection sociale et l’Autorité européenne du travail…»

 

…Nouvelle directive détachement

En 2015, nous en étions à environ 2 millions de travailleurs en détachement au sein de l’Union européenne, ce qui représente 0,9% de l’emploi au sein de l’Union européenne. Les principaux pays d’accueil des travailleurs détachés sont l’Allemagne (414908), la France (177674), la Belgique (156556), mais il y a aussi la situation des travailleurs en détachement vers d’autres États membres : La France et l’Allemagne font partie des trois pays qui détachent le plus de travailleurs en Europe (respectivement 218006 et 251107) derrière la Pologne (130468)  (1)

 

Conseil des ministres affaires sociales

Ce 23 octobre à Luxembourg, en dépit de l’opposition de la Pologne, de la Hongrie, de la Lettonie, et de la Lituanie, et l’abstention du Royaume Uni, de la Croatie et l’Irlande un accord a pu être conclu pour la révision de la Directive de 1996  à propos des travailleurs détachés en Europe. Après on heures de négociations, un compromis sur la durée du détachement a été accepté : Un maximum de douze mois assorti d’une possible rallonge de six mois à la demande de l’entreprise concernée.

 

Un autre acquis important : Les salariés détachés dans un Etat membre de l’Union européenne devront être payés au même niveau que leurs collègues du lieu de travail et non systématiquement  au salaire minimum.

 

Ils devront également bénéficier des différentes primes perçues par leurs collègues de travail : pénibilités, treizième mois, ancienneté…Et il reste aussi à obtenir des garanties pour le versement effectif des indemnités, les liens avec les différentes conventions collectives, l’échéance de mise en œuvre de la nouvelle directive…

 

… et Le combat continue…

Des avancées ont été obtenues, mais le combat continue…car il est toujours possible d’obtenir plus et mieux par l’action conjuguée des forces syndicales, associatives et politiques. C’est ce qui s’est passé depuis 1996 année de la ratification du contenu de cette directive qui a été mise en cause dès son adoption.

 

Nous sommes dans le cas de figure de ce que dénommait Robert Schuman : « l’Europe des petits pas », c’est souvent comme ça que celle-ci a progressé depuis le 9 mai 1950 par de rudes débats et compromis construits de plus en plus difficilement au fur et à mesure que l’Union européenne s’est élargie.

 

Pour la Confédération Européenne des Syndicats CES il reste encore largement de quoi poursuivre  les négociations

Les travailleurs du secteur des transports ont été exclus de ce compromis. Il est vital que soit mis sur la table un échéancier précis pour aborder la spécificité de la nouvelle directive au regard des réalités propres à ce secteur d’activité. Ce qui rassurerait les professions concernées et permettrait d’avoir des points de repères pour aboutir à un accord sectoriel, sans qu’il soit repoussé à l’infini ce qui amoindrirait les résultats obtenus ce 23 octobre.

 

Pour Business Europe (une des organisations patronales européenne) « Nous sommes profondément préoccupés par les aspects clés de l’accord…les besoins des entreprises doivent être mieux reconnus dans les négociations du trilogue… » « C’est un mauvais compromis conduit par le symbolisme politique. Au lieu de défendre la liberté et le mouvement et de faire appliquer des règles déjà existantes pour combattre les abus, le Conseil a accrédité un mythe selon lequel les règles existantes devaient être modifiées pour lutter contre le dumping social et diviser l’Europe »

 

Si les acteurs sociaux en Europe ont encore beaucoup à faire pour transformer ces différentes étapes sociales en essais significatifs, la balle est aussi du côté du Parlement européen.

 

Jean-Pierre Bobichon – Administrateur – Membre fondateur de l’Ipse

 

(1) Chiffres 2015 – Commission européenne –