La stratégie Europe 2020 dans l’impasse ?

 

A mi-parcours de la stratégie Europe 2020, les députés européens n’ont pu que constater la faible avancée dans les objectifs sociaux de la stratégie, le 25 novembre dernier, lors de la séance plénière du Parlement. Une des solutions avancées pour accélérer le processus est le rééquilibrage entre les mesures économiques et les mesures sociales, en rendant les objectifs liés à ces dernières contraignantes. L’Ipse a récemment aussi fait part de ses considérations quant à la stratégie Europe 2020 en répondant à la consultation de la Commission européenne.

 

 

La stratégie Europe 2020 repose sur la réalisation de cinq grands objectifs, dont trois sociaux. Elle vise ainsi un taux d’emploi de 75% en 2020 pour la tranche de population âgée de 20 à 64 ans, une réduction d’au moins 20 millions du nombre de personnes touchées ou menacées par la pauvreté et l’exclusion sociale, et un abaissement du taux de sortie précoce du système scolaire à moins de 10%, ainsi qu’un diplôme de l’enseignement supérieur pour au moins 40% des 30 à 34 ans. Or, depuis la mise en place de la stratégie, en 2010, le taux de chômage a continué d’augmenter dans certains Etats membres, ainsi que le nombre de travailleurs pauvres. Le constat est identique quant au nombre de personnes exposées au risque de pauvreté ou d’exclusion sociale. Seuls les objectifs dans la lutte contre le décrochage scolaire précoce semblent en voie d’être atteints.

 

Dans le texte adopté à l’issue de la séance plénière du 25 novembre sur l’« emploi et [les] aspects sociaux dans le cadre de la stratégie Europe 2020 », le Parlement européen a insisté sur le fait « qu’une augmentation de la croissance économique ne garantit pas en soi davantage d’emplois décents, une baisse de la pauvreté et une réduction des inégalités sociales, mais que ces objectifs nécessitent des choix politiques adéquats ». A ce titre, le Parlement « déplore que les politiques actuelles restent

focalisées exclusivement sur la croissance économique sans tenir compte de la nécessité d’une approche inclusive, durable et fondée sur des droits ».

 

Parmi les différentes hypothèses émises pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020, le Parlement souhaite promouvoir l’importance des systèmes de sécurité sociale en tant que stabilisateur économique, de la mise en place d’un système d’alternance renforçant le marché du

travail, de la création d’emploi de qualité, d’évoquer les questions femmes/hommes, de supprimer les charges administratives pour les indépendants, micro-entreprises et PME, etc. …

 

Jutta Steinruck, eurodéputée allemande S&D

Jutta Steinruck, eurodéputée S&D

Pour ce faire, le Parlement européen prône une approche inclusive. Le secrétaire d’Etat italien chargé des Affaires européennes, Sandro Gozi, estime qu’il est importan

t d’aligner la gouvernance de la stratégie avec le Semestre européen et de développer

de manière beaucoup plus

intégrée l’économique, le social et le développement.

Certains députés sont allés plus loin dans les propositions, à l’instar de Jutta Steinruck (S&D, Allemagne) qui, soulignant que la crédibilité même de la stratégie était en jeu, a affirmé qu’il était « important que les objectifs de la politique sociale deviennent contraignants ».

 

L’Ipse répond à la Commission sur Europe 2020

 

Cinq ans après le lancement de la stratégie qui s’étend sur l’actuelle décennie, la Commission européenne avait lancé une consultation ouverte au public de mars à octobre 2014, à laquelle l’Ipse a répondu.

 

L’Ipse a ainsi rappelé que la stratégie Europe 2020 ne parviendrait à une croissance  « intelligente, durable et inclusive que si la dimension sociale [était] suffisamment prise en compte » aux côtés du pilier économique et budgétaire et « que si les Etats [restaient] dotés de systèmes de protection sociale modernes et efficaces ». Dans ces temps marqués par un chômage important et la montée des partis europhobes et populistes, l’Union a réellement besoin de « remettre la solidarité au cœur de son projet » pour renforcer la cohésion. Or, « nos systèmes de protection sociale sont des piliers et des vecteurs de cette solidarité ».

L’Ipse s’est par ailleurs prononcé en faveur de la création d’une assurance chômage européenne, un projet basé sur la solidarité qui pourrait donner « une véritable incarnation à l’Europe sociale ».

 

Enfin, l’Ipse a tenu à souligner que les mutuelles et les  groupes paritaires de protection sociale sont « des entreprises qui apportent une couverture complémentaire afin de garantir une protection sociale efficiente et qui développent également des actions socialement innovantes pour répondre aux nouveaux besoins des populations ». « Acteurs de la cohésion sociale, ils luttent contre la pauvreté et favorisent l’emploi et la reprise d’emploi et contribuent de ce fait à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 ».

L’Ipse a également invité la Commission à continuer ses travaux sur l’Entrepreneuriat social et à proposer une législation pour un Statut de la mutuelle européenne.