Réponses du groupe de la gauche unitaire européenne (GUE / NGL) à l’Ipse

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A la veille des élections du Parlement européen, l’Ipse a posé trois questions aux principaux groupes du Parlement européen (PPE, S&D, ALDE, Verts/ALE et GUE/NGL). Au menu : la dimension sociale de l’Union économique et monétaire, la libre circulation et convergence sociale ainsi que l’économie sociale et l’entrepreneuriat social. Le Groupe de la Gauche Unitaire Européenne / Gauche Verte Nordique (GUE/NGL) nous a répondu, au nom de sa présidente, Gabriele Zimmer.

 

1)    Doter l’Union économique et monétaire d’un volet social

 

Ipse : Quel rôle et quelle place doit avoir selon vous le pilier social de l’UEM ? Par quelles mesures concrètes (renforcement du dialogue social, indicateurs sociaux, assurance chômage européenne, aides européennes, etc.) passe la réalisation de ce pilier social et quel rôle peut y jouer la protection sociale ? 

 

Gabriele Zimmer : « La coordination de la gouvernance économique doit garantir les droits fondamentaux des personnes dans le cadre des politiques de gestion de crise, assurer que la voix du Parlement soit entendue et viser une réduction réelle des déséquilibres macroéconomiques.

 

Les pays très endettés ont été mis sous surveillance macroéconomique, mais je me demande pourquoi l’Allemagne n’est soumise à aucunes exigences de contrôle fiscal la contraignant à augmenter les salaires et les investissements durables, alors que le pays réalise ses plus gros excédents à l’exportation jamais encore réalisés ? Les bénéfices des uns font les dettes des autres ; si nous ne changeons rien à ce sujet, l’épée de Damoclès de la prochaine crise sera suspendue au-dessus de l’UE.

 

Quand le dialogue social est uniquement utilisé pour promouvoir l’austérité, nous ne voyons pas cela comme une mesure visant à améliorer la situation des travailleurs et des citoyens. Nous reconnaissons que les indicateurs sociaux sont de bons instruments de contrôle des autres mesures prises, mais ils doivent aboutir à des mesures concrètes réduisant le chômage et la pauvreté. Nous sommes ouverts à la discussion quant à l’idée d’une assurance chômage en Europe, mais il ne faut pas que cela conduise à une mobilité forcée.

 

Une Union européenne sans une union sociale ne peut pas fonctionner. Par conséquent, nous devons commencer par créer une dimension sociale afin d’aboutir à une Union sociale.

 

Nous avons besoin d’un programme économique qui investit dans l’avenir, crée des emplois et renforce les systèmes d’éducation et de soins de santé et les infrastructures publiques, et met en œuvre la transition énergétique d’une manière socialement responsable. Nous voulons introduire des salaires minimums obligatoires dans toute l’UE s’élevant à au moins 60% du salaire moyen dans le pays concerné, un avantage social minimum sans pénalité et une pension minimale légale pour un montant représentant 60% du revenu médian local. »

 

 

2)    Plus de convergence sociale ?

 

Ipse : Doit-on aller vers davantage de convergence sociale et fiscale dans l’UE pour atténuer les tensions entre les différentes zones Nord-Sud, Est-Ouest ou encore centre et périphérie et faciliter la mobilité des travailleurs ? Quelles priorités précises dans ce cadre ?

 

G.Z.: « Quand les gens décident de travailler dans un autre pays, cela n’a rien à voir avec le fait que « le marché intérieur [reste] imparfait ». Les gens ont un contexte culturel, une famille et des voisins, ils ont besoin de compétences linguistiques et d’informations, ce que beaucoup de personnes qui doivent quitter leur pays n’ont pas. Pour la majorité d’entre eux, ce n’est pas un choix délibéré de vivre et de travailler dans d’autres pays, mais bien une nécessité économique. Pour un petit groupe de personnes hautement qualifiées, il s’agit d’une décision libre, mais cela concerne ceux qui sont bien payés et qualifiés.

 

Par ailleurs, les travailleurs détachés ne sont pas traités comme des travailleurs ordinaires dans le droit de l’UE et ils ne sont pas soumis aux règles de mobilité des travailleurs (autrement, ils pourraient réclamer un salaire égal pour un travail égal sur le même lieu de travail). Ils sont considérés comme des fournisseurs de services. S’il ne s’agissait pas de mobilité forcée, nous pourrions soutenir cela. Et pour certains pays, cela peut aussi être un problème de ce qu’on appelle la «fuite des cerveaux».

 

En définitive, selon nous, la mobilité devrait être soutenue si elle n’est pas forcée. Les travailleurs détachés doivent obtenir l‘égalité des salaires. Pour favoriser la mobilité, il faudrait davantage appuyer sur les compétences linguistiques et l’information concernant les autres États membres. »

 

 

3)    Développement de l’entrepreneuriat social et de l’économie sociale

 

Ipse : De quelle manière le prochain Parlement européen peut-il s’approprier pleinement cette question de l’entrepreneuriat social, du développement de l’économie sociale, et donner suite aux propositions d’actions formulées à Strasbourg ?

 

G.Z.: « La question de l’entrepreneuriat social est très délicate. L’entrepreneuriat social couvre normalement le secteur des services d’intérêt général. Ici, la question doit être de savoir comment fournir ces services pour couvrir toutes les régions d’un État membre et toutes les populations. Avec le nombre croissant de personnes âgées, ce défi est crucial. Pour nous, ce secteur ne doit pas être privatisé, ni poursuivre un but lucratif. Par exemple, les fonds spéculatifs commencent à prendre le contrôle de maisons de soins dans certains États membres. »