Réponses du Groupe des Verts / ALE à l’Ipse

photo Daniel CohnbenditA la veille des élections du Parlement européen, l’Ipse a posé trois questions aux principaux groupes du Parlement européen (PPE, S&D, ALDE, Verts/ALE et GUE/NGL). Au menu : la dimension sociale de l’Union économique et monétaire, la libre circulation et convergence sociale ainsi que l’économie sociale et l’entrepreneuriat social.Le Groupe des Verts/ALE nous a répondu, au nom de son président, Daniel Cohn-Bendit.

 

1)    Doter l’Union économique et monétaire d’un volet social

 

Ipse : Quel rôle et quelle place doit avoir selon vous le pilier social de l’Union économique et monétaire européen (UEM) ? Par quelles mesures concrètes (renforcement du dialogue social, indicateurs sociaux, assurance chômage européenne, aides européennes, etc.) passe la réalisation de ce pilier social et quel rôle peut y jouer la protection sociale ? 

 

« Le groupe des Verts-ALE a demandé à plusieurs reprises à développer la dimension sociale de l’UEM et de renforcer les fondements de l’Union monétaire qui devrait être construite sur des bases démocratiques solides et la méthode communautaire. Sans une forte dimension sociale, l’UEM risque niveler le sociale vers le bas et sera incapable de contrer le chômage record et les inégalités croissantes ou d’assurer la viabilité des économies.

 

Les politiques actuelles sont basées sur un tableau de bord d’indicateurs incomplets dans la procédure des déséquilibres macroéconomiques, menant à des politiques régressives socialement et écologiquement. Nous devons traiter non seulement les évolutions macroéconomiques et financières, mais aussi la situation sociale des citoyens européens.

 

En Juin dernier, les co-présidents des Verts-ALE ont adressé une lettre à MM. Barroso / Van Rompuy sur la dimension sociale de l’UEM, et les a appelés à :

 

  • mettre des indicateurs sociaux et de l’emploi au cœur de la gouvernance économique – et de leur donner la même valeur que les indicateurs économiques ;
  • réviser le tableau de bord  des indicateurs pour inclure : l’emploi, l’inégalité des revenus, la pauvreté au travail, la productivité des ressources, la productivité du capital, composante de l’énergie, baisser le seuil de l’indicateur sur le coût unitaire de la main d’œuvre, l’empreinte écologique, les dépenses d’éducation … ;
  • un tableau de bord supplémentaire est nécessaire mais il ne peut se substituer à une révision de la procédure de déséquilibres macroéconomiques ; nous avons besoin des deux, sinon nous risquons de finir avec un tableau de bord social faible et non contraignant qui continue d’être annihilé par la procédure contraignante de déséquilibres macroéconomiques qui manque d’éléments sociaux ;
  • rôle à part entière pour les partenaires sociaux ;
  • progresser sur un instrument de l’UE pour l’absorption de choc asymétrique ;
  • établir et améliorer les normes minimales de l’UE concernant la politique sociale pour empêcher le nivèlement vers le bas des salaires, des droits du travail et des normes sociales.

Selon les Verts-ALE,  » la dimension sociale de l’UEM doit être plus qu’une simple mesure et qu’un suivi de la situation sociale. Le chômage alarmant, les inégalités et la pauvreté doivent avoir un impact réel sur les autres politiques économiques européennes contraignantes, telles que des corrections de déficits excessifs ou des déséquilibres économiques excessifs, et être pris directement en compte dans la formulation de ces politiques ».

 

Les autres partis le disent du bout des lèvres, mais quand il s’agit de faire des propositions concrètes, ils reculent la plupart du temps (voir vote sur les amendements des Verts sur la résolution relative à la dimension sociale de l’UEM).

 

  • Les Verts soutiennent la mise en place d’un tableau de bord sur les indicateurs sociaux et de l’emploi clés, et a appelé à ce que ces indicateurs soient intégrés dans le tableau de bord pour la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques.
  • Nous croyons que ces indicateurs devraient être mis sur un pied d’égalité avec les indicateurs budgétaires et macroéconomiques existants dans l’évaluation des politiques nationales et les recommandations subséquentes de pays spécifiques, ainsi que dans les décisions sur la correction des déficits excessifs et des déséquilibres macroéconomiques excessifs.
  • Nous serions favorables à l’inclusion d’un indicateur pour mesurer l’inégalité et d’indicateurs qui auraient un caractère préventif fort, tel que l’accès à la formation et à l’éducation, à un emploi à durée déterminée involontaire ou à temps partiel, le taux de pauvreté au travail et un revenu de remplacement après le chômage.
  • Nous avons souligné que la vision détaillée sur le rôle et les modalités des stabilisateurs automatiques a été absente de la communication de la Commission du 2 octobre 2013 et a invité la Commission à présenter un livre vert avec des options détaillées pour les stabilisateurs automatiques comprenant un régime de prestations chômage en Europe (avant la fin 2013).

 

Le dialogue social :

 

Une Union économique et monétaire stable requiert d’aborder les déséquilibres macroéconomiques importants entre les États membres (qui résultent de différences dans les cycles économiques, le prix et la dynamique des salaires). À notre avis, les salaires ne sont pas simplement des variables d’ajustement macroéconomiques, mais aussi la principale source de revenus nécessaire pour vivre décemment.

 

Nous croyons qu’un fort dialogue social européen et qu’une négociation collective transnationale / transfrontalière pourraient contribuer à endiguer l’émergence d’importants déséquilibres. Nous souhaitons que les partenaires sociaux jouent pleinement leur rôle dans la structure de gouvernance économique renforcée.

Les systèmes nationaux doivent être pleinement respectés tandis que la coordination pourrait être améliorée à travers l’UE. »

 

 

2)    Plus de convergence sociale ?

 

Ipse : Doit-on aller vers davantage de convergence sociale et fiscale dans l’UE pour atténuer les tensions entre les différentes zones Nord-Sud, Est-Ouest ou encore centre et périphérie et faciliter la mobilité des travailleurs ? Quelles priorités précises dans ce cadre ?

 

 

« Les Verts défendent les droits relatifs à la libre circulation sans restrictions. Nous avons longtemps et âprement lutté pour que les membres de la famille des travailleurs mobiles ne soient pas victimes de discrimination et aient les mêmes droits que les nationaux. Cela inclut en particulier l’accès au travail et aux droits de la sécurité sociale, mais aussi l’accès aux soins, au logement, aux services sociaux et de santé.

 

Nous sommes et avons été contre les restrictions pour les pays candidats à l’adhésion – ne pas octroyer aux citoyens européens le droit de circuler librement est une restriction aux droits fondamentaux des citoyens et crée une Europe à 2 niveaux.

Les droits de libre circulation doivent aller de pair avec une forte protection, afin que les travailleurs, qui décident de devenir mobiles, connaissent leurs droits et ne soient pas exploités.

 

Nous avons une forte expertise et des acquis sur les droits de la sécurité sociale. Jean Lambert, eurodéputé Vert anglais, a été rapporteur pour l’extension des droits de coordination de la sécurité sociale aux ressortissants de pays tiers et à leur famille. Nous relions les demandes des citoyens concernant les problématiques de sécurité sociale des travailleurs mobiles avec notre action politique concrète.

 

Dans les prochaines années, nous allons travailler dur pour étendre les droits de la sécurité sociale, tels que l’exportation des prestations chômage, les droits des membres de la famille et les droits des sinistres. Dans le contexte de la libre circulation des travailleurs, nous travaillons dur pour renforcer les droits procéduraux et les procédures de traitement des plaintes des citoyens et la reconnaissance mutuelle des partenariats dans l’UE.

 

Priorités

 

Nous croyons que le but ultime de l’économie est d’être bénéfique à la société – et non l’inverse.

 

Une des premières priorités devrait être d’arrêter les mesures d’austérité, qui portent préjudice à la cohésion sociale et ne contribuent pas à un moyen (durable) de sortie de  crise. Au lieu de cela, l’économie aurait besoin d’une stabilisation et de s’orienter vers un virage vert.

 

Le « Green New Deal » est sur le point de transformer nos économies en luttant contre le changement climatique, le chômage et l’exclusion sociale et en re-réglementant l’industrie financière de manière à servir l’économie réelle.

 

Parmi les priorités figurent également un meilleur ciblage des fonds afin qu’ils atteignent ceux qui en ont besoin. Les Verts ont joué un rôle majeur dans l’amélioration significative du ciblage du Fonds social européen, notamment par l’attribution d’un minimum de 20 % pour les mesures d’inclusion sociale et de lutte contre la pauvreté.

 

Nous avons appuyé les mesures de financement différenciées dans des fonds liés à l’emploi et d’inclusion sociale.

 

Nous voulons voir des progrès sur le concept d’un instrument de l’UE pour l’absorption de choc asymétrique, liés par exemple au chômage (à court terme). »

 

 

3)    Développement de l’entrepreneuriat social et de l’économie sociale

 

Ipse : De quelle manière le prochain Parlement européen peut-il s’approprier pleinement cette question de l’entrepreneuriat social, du développement de l’économie sociale, et donner suite aux propositions d’actions formulées à Strasbourg ?

 

« Renforcer les coopératives et l’entrepreneuriat social sont des éléments fondamentaux de l’économie sociale. Dans le rapport Giegold, qui fixe les principales exigences, nous continuons à demander un suivi de près du sujet.

Le rapport rappelle que :

 

• les spécificités des entreprises de l’économie sociale doivent être reconnues et prises en compte dans les politiques européennes,

 

• des mesures devraient être prises pour veiller à ce que l’Observatoire européen des PME comprenne les entreprises de l’économie sociale dans ses enquêtes,

 

• le dialogue avec les entreprises de l’économie sociale doit être renforcé,

 

• le cadre juridique de ces entreprises dans les États membres devrait être amélioré;

 

• la Commission s’est engagée à soutenir les parties prenantes et l’organisation d’un échange structuré d’informations, diffuser les meilleures pratiques pour améliorer la législation nationale, la collecte de statistiques européennes sur les coopératives, la simplification et la révision de la législation européenne sur les coopératives et le lancement de programmes d’éducation adaptés et notamment les références aux coopératives dans des instruments financiers du FEI ;

 

Les Verts ont poussé le Parlement à affirmer à maintes reprises son soutien à l’économie sociale et continueront de le faire.

 

Ci-dessous le lien vers une interview vidéo de Swen Giegold concernant son rapport : http://www.sven-giegold.de/2012/interview-on-the-european-copperative-society-statute/

 

Un lien vers la décision du Parlement européen sur le Fonds européen d’entrepreneuriat sociale (FESE), qui contribue également à quelques (grandes) entreprises d’économie sociale : http://www.sven-giegold.de/2013/europaparlament-verabschiedet-effektive-regeln-fur-soziale-investitionen-und-wagniskapital/

 

Voici ce que la commission des affaires économiques et monétaires (ECON) a décidé pour de meilleures statistiques pour l’économie sociale (uniquement en allemand) : http://www.sven-giegold.de/2012/europaparlament-erreicht-bessere-benutzerfreundliche-statistikensoziale-und-solidarische-okonomie-wird-zukunftig-erfasst/