Application du droit de la concurrence aux organismes chargés de la gestion d’un régime légal d’assurance maladie

Lors d’un récent article, l’Ipse s’interrogeait sur les conséquences d’un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 3 octobre 2013 portant sur le champ de la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises (Affaire C-59/12 – BKK Mobil Oil Körperschaft des öffentlichen Rechts contre Zentrale zur Bekämpfung unlauteren Wettbewerbs eV). Celui-ci ne remet toutefois pas en cause le caractère obligatoire de la sécurité sociale en France.

 

La Cour estime que si un organisme de droit public en charge d’une mission d’intérêt général mène à titre subsidiaire des opérations commerciales, ce qui était le cas de l’organisme allemand en cause dans l’affaire, il doit respecter les dispositions de la directive 2005/29/CE pour ce type d’opérations.

 

L’Ipse dans ses commentaires affirme  alors qu’ « une partie de la jurisprudence antérieure fait en quelque sorte l’objet d’une correction ».

Même s’il convient d’être vigilant sur l’évolution de la jurisprudence en ce domaine, l’Ipse tient à rappeler que cette décision ne change rien à la nature des activités poursuivies par la sécurité sociale française, ni à l’obligation de cotiser auprès de celle-ci.

 

Conformément à la jurisprudence constante de la Cour de Justice de l’Union européenne, n’étant pas de nature économique, ces activités ne sont pas soumises au droit européen de la concurrence, auquel peut être rattaché l’arrêt précité.  

 

Toute personne qui travaille et réside en France est obligatoirement affiliée au régime de Sécurité sociale dont elle relève : régime général des salariés, régimes de non-salariés ou régimes spéciaux (par exemple le régime de la SNCF). Et à ce titre, elle est assujettie aux cotisations de Sécurité sociale correspondantes, à la CSG [1] et à la CRDS [2].

 

Bien entendu, pour améliorer sa protection sociale, chacun peut bénéficier de couvertures complémentaires auprès d’entreprises d’assurance, de mutuelles ou d’institutions de prévoyance ou également, depuis 1994, d’organismes assureurs établis dans un autre État de l’Union européenne.

 

En France, ces couvertures professionnelles ou individuelles complètent la Sécurité sociale, elles ne peuvent s’y substituer. Ceci résulte de la Constitution qui fixe un droit pour tous à une Sécurité sociale élevée et solidaire.

 

Ainsi, le premier article (L111-1 du Code de la Sécurité sociale) rappelle le principe de solidarité sur lequel s’appuie la Sécurité sociale et proclame l’obligation de s’affilier à la Sécurité sociale pour les personnes qui travaillent en France.

 

L’obligation de cotiser en France est compatible :

  • avec la coordination européenne des régimes de Sécurité sociale. En effet, les États membres sont libres d’organiser comme ils l’entendent leur système de Sécurité sociale et, notamment de fixer dans leurs législations nationales pour chacun des risques, le niveau des prestations, le mode et le niveau de financement, les modalités de fonctionnement du régime et son degré de solidarité entre les citoyens;
  •  les règles européennes de la concurrence car celles-ci ne sont pas applicables à la Sécurité sociale qui n’exerce pas des activité économiques au sens des règles européennes de la concurrence ;
  • les directives européennes sur l’assurance, notamment avec les dispositions de la directive 92/49 CEE sur l’abolition de monopoles qui visent non pas la Sécurité sociale mais certains domaines de l’assurance privée.