la reponse est non, mais quelle etait la question ?

Bien au-delà de juger si un million d’électeurs irlandais, par leur vote en faveur du non, peuvent s’arroger un droit de véto, je retiendrai trois considérations simples pour observer et agir sur le devenir de l’Europe communautaire.

La première porte sur le référendum, naturellement mal adapté, si un ou quelques Etats seulement adoptent ce mode de ratification. Légitime il peut l’être en revanche, si considérant que tel nouveau Traité engage l’Europe sur une voie foncièrement nouvelle, l’ensemble des citoyens européens sont appelés à s’exprimer par cette voie, avec une unité de temps et d’objet : un même jour, une même interrogation (ceci peut poser problème pour certains pays, tel l’Allemagne où pour des raisons historiques, ce type de scrutin est banni). Or, dans le cas irlandais en 2008 et les cas néerlandais et français en 2005 (mais aussi espagnol et luxembourgeois), la question est posée par un chef d’Etat et non par la représentation de l’Union européenne.
Pour Alain Lamassoure, député PPE, « les partisans du non ont répondu à tout, sauf à la question posée », le « ras le bol » des électeurs dépasse une prise de position sur un texte opaque que certains, imprudemment, ont taxé de « simplifié ».
« La réponse est non, mais quelle était la question ? » suggère Woody Allen !
Deuxième aspect, l’irritation perceptible des citoyens face aux discours technocratiques de commissaires européens, est encouragée par une médiatisation à outrance et recherchée, flattant l’écume et non le fond d’une vie politique virant trop souvent vers les populismes tant de gauche que de droite. A cela ajoutons pour reprendre l’éditorialiste Jean-Claude Guillebaud (Ouest-France) ; « l’idéologie néolibérale quasi extrémiste que partagent la plupart des membres de la Commission, à commencer par son président ».
Poches de pauvreté conséquentes (la riche et inégalitaire Irlande en est une expression vive), baisse de pouvoir d’achat, crise et révolution des sources d’énergie liées au profond bouleversement climatique, tant d’autres questions immédiates qui ne trouvent pas de réponse dans un annuaire de textes dont pourtant 80% organisait notre vie quotidienne.
Il est plus que temps de rendre visible, lisible et plus démocratique l’inéluctable marche vers plus d’Europe !
Troisième et dernière considération, les modèles sociaux et économiques, loin de se rapprocher, s’éloignent les uns des autres. Dans un contexte de mondialisation accélérée, de crise financière périlleuse, la « fibre » européenne ne fonctionne guère, alors même que 90% des échanges commerciaux se déroulent au sein de l’Union.
Citons quelques expressions de la presse européenne significatives ! « Cauchemar européen » titre le quotidien Süddeutsche Zeitung, « L’Europe est menacée de connaître le sort de nombres d’entreprises familiales : la première génération a posé les fondations, la deuxième a construit par-dessus, la troisième est sur le point de dilapider l’héritage » formule le Tagesspiegel.
Hors Union, « Le Temps » de Genève est pertinent : « La Suisse en sait quelque chose : consulter le peuple revient à prendre le risque permanent du désaveu »…Faut-il prendre en grippe les électeurs ? Non. Mieux vaut réfléchir sur les moyens de renouer avec les citoyens « même si ceux-ci doivent aussi être conscients de leurs devoirs ».
L’Ipse n’a cessé d’intervenir pour la nécessaire cohésion sociale, toujours à renforcer, à adapter aux nouveaux temps : économiques, culturels, environnementaux, sociétaux. Humblement mais avec détermination, dans le cadre de nos prérogatives et domaines d’activités, nous poursuivons nos actions d’information, de formation et d’organisation de débats ouverts, d’études pour concourir à faire de la protection sociale la clé de voûte de la cohésion sociale, c’est déjà ce que font les adhérents de l’Ipse par leur métier d’opérateur d’assurances de personnes solidaire et non lucratif et leur action sociale.
La construction européenne se poursuivra et sera souvent encore malmenée. Elle ne déploiera ses qualités que si le Traité existe avec des institutions fortes, des partenaires sociaux européens acteurs d’un dialogue social interprofessionnel et sectoriel conséquents, une proximité renouvelée auprès des populations avec un rapprochement des modèles sociaux.