Perturbateurs endocriniens et accords commerciaux

On aimerait croire à la bonne foi de la Commission Européenne et en leur volonté de protéger les citoyens quand on voit le communiqué de presse du 15 Juin 2016. En effet, celui-ci présente enfin des critères scientifiques permettant d’identifier les perturbateurs endocriniens dans le domaine des pesticides et biocides. Définir ces substances est un premier pas vers la règlementation afin de préserver la population de ses effets sur la santé (troubles de la fonction reproductrice, malformations, troubles de la maturation et du développement, troubles du comportement, cancers, altération du système immunitaire, etc.). Jean-Claude Juncker y déclare même que « La Commission s’est engagée à assurer le niveau le plus élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement ».

 

Pourtant, à travers ces nouveaux critères, la Commission outrepasse ses droits. Quand on y regarde de plus près, cette définition limite les perturbateurs endocriniens aux substances dont les effets nocifs sont avérés. Cela est contraire aux Règlements Pesticides et Biocides qui excluaient « toute substance pouvant être néfaste pour l’homme ». En changeant ce principe, la Commission, va au-delà des attributions qui lui ont été confiées par Parlement Européen et le Conseil.

 

Entre des « effets nocifs avérés » et des substances « pouvant être néfastes », on voit peu de différence. Pourtant, cette nuance a une importance de taille car cela implique qu’avec la nouvelle définition,  tant que le danger d’une substance n’a pas été scientifiquement prouvé (ce qui est long et couteux), le produit peut être mis sur le marché. Cela va à l’encontre du principe de précautions qui caractérise la Commission.

 

Mais pourquoi avoir changé ainsi de ligne directrice ? Il se trouve que les Etats-Unis et le Canada exercent depuis 2013 une pression sur l’Europe. Ils se trouvaient directement concernés  par la réglementation européenne sur les pesticides de 2009. La logique de précaution risquait de réduire leurs exportations vers l’Union Européenne. C’est-à-dire que la définition des perturbateurs endocriniens est au cœur de conflits d’intérêts et peut jouer sur la conclusion d’accords commerciaux tels que le TAFTA ou le CETA ;  Avec cette proposition législative, des milliers de produits potentiellement dangereux pourront inonder nos marchés, combien de temps s’écoulera t’il avant que leur dangerosité soit avérée et combien de victimes ?